Le premier que j'ai entendu s'exprimer à ce sujet, c'est lui : Zbynek Cepela. Il était intarissable sur la question, et « bénéficiait », en toute amitié, de mon incompréhension la plus totale : comment peut-on perdre le temps à voyager à des milliers de kilomètres quand on habite en Provence, entre Châteauvert, Châteaudouble et le Verdon ?
Avec son accent tchèque inimitable, sa canette de bière greffée à la main, son allure de magicien blanc et sa syntaxe très personnelle, il avait lancé :
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"Très bon escalade en Crète. Beaucoup jolies falaises. Mais Crète ça fait comme virus. Ou tomber amoureux, acheter petit maison blanc et un jour vivre là-bas ; ou alors gens rien voir extraordinaire, rien apprécier, pas revenir. Jamais."
A défaut d'être grammaticalement correcte (ce qui donne à l'élocution de Zbynek un charme certain) l’expression de son point de vue, était claire et imagée :
la Crète on en devient addict dès la première visite ou bien elle vous laisse indifférent pour toujours.
Pourquoi pas ! Très sceptique sur le bien fondé de cette conjecture à l’emporte-pièce, comme j'avais fini par accepter de l'accompagner là-bas, je profiterai du voyage pour lui ramener un peu les pieds sur terre, lui démontrer qu'avec un minimum de rationalisme, entre addiction et indifférence il y a TOUJOURS une "voie du milieu".
Autant l'avouer tout de suite, c’était très, très présomptueux de ma part. Le « mystère de la Crète », a eu sur moi aussi son petit effet magique. Il est vrai que, comme le dit si simplement Níkos Kazantzákis :
« Nulle part ailleurs on ne passe aussi aisément de la réalité au rêve ».
Je vous laisse en juger par vous-même.